D'une simple escapade

Dernier scel, dernière missive, Nennya s'étala lourdement sur son fauteuil, elle essaya veinement de détendre ses muscles...Elle sentait la moindre veine de son cerveau, un alambic prêt à exploser. Se levant, elle pris la décision de prendre l'air normand. Il faisait soleil, elle se couvrit la tête en conséquences, seul ses yeux noisettes resortaient, digne d'une grande espionne.
Prenant son mantel aux couleurs pourpres, elle déambula dans les couloirs frais de la propriété du Duc d'Evreux, jusqu'à sortir par la petite porte à l'arrière et enfin admirer les jardins de sa Grâce. Parfaitement dessinés, parfaitement proportionnés.
Elle éfleura du doigt, une rose aux couleurs festives, elle se pencha pour humer cette senteur, une goutte de rosées vint lui caresser la main...des simples plaisirs pour Nennya.
D'un pas léger, elle continua sa course vers un banc, où elle pourrait admirer les splendeurs d'Evreux. Que du chemin depuis son arrivée...Juin 1456...Rory...Vice chambellan...puis Chambellan...l'angoisse lorsque celle ci se présenta au domaine d'Evreux pour la première fois. Elle repensa à tout cela, les yeux dans le vague.

Cléopatre venait de lever la tete de tous ses dossiers. Elle pensait avoir bien travailler, elle avait besoin de prendre l'air. Elle décida d'aller faire un tour dans les jardins. Elle ne les avait jamais vu en fait, et un retour à la nature lui ferait du bien.

Il faisait encore doux pour le mois, mais il y avait un ciel bleu avec quelques nuages. Elle prit sa cape, et sortit. Elle admirait au fur et à mesure de sa balade les jolies roses, l'étang, les oiseaux. Et vit au loin une jeune femme assise sur un banc, elle avait l'air perdu dans ses pensées.

Cléo continua son chemin, et alla s'installer un peu plus loin sous un arbre, afin de contempler la beauté du lieu.

Mais elle pensa que la mer et son amour lui manquaient terriblement. Quand les reverrait-elle ?

Rien de tel qu'une petite balade dans le jardin pour prendre un peu de hauteur. Les guerres ou la paix, les alliances, les trahisons; telle était la réalité diplomatique mais pas la réalité de sa vie. Du recul ne faisait donc pas de mal pour se recentrer se ressourcer.

Et puis le soleil majestueux était propice aux égarements dans ce hâvre de verdure. Au loin le clapotis de l'eau. Quelle quiétude, quelle sérénité !

Un peu plus loin il apercevait une dame sur un banc; la tête couverte. En allant un peu plus par devant elle il réalisa qu'il s'agissait de la Duchesse consort Nennya Blackney. Et elle avait l'air quelque peu pensive ...

Il ne voyait que ses yeux et avait du mal a discerner si elle était inquiète, nostalgique, amusée, ou quelle qu'autre émotion. Ne valait il pas mieux la laisser tranquille ? A vrai dire le Dieppois avait parfois un manque de tact caractérisé. Il ne voulait pas indisposer la Chambellan.

Finalement il se dit qu'il était fort disconvenant de ne pas saluer une personne qu'il appréciait tant. Il se lança donc et l'interpela.

Bonjour Excellence ! Mes hommages ! Je .... comment dire .... vous ... vous m'avez l'air bien pensive en fait. Comment allez vous ?

Il lui sourit tout en priant intérieurement ne pas avoir été encore une fois trop direct ou trop curieux.

Bonjour Excellence ! Mes hommages ! Je .... comment dire .... vous ... vous m'avez l'air bien pensive en fait. Comment allez vous ?

Nennya sursauta comme un chat, elle releva la tête, ouf, ce n'était pas une attaque, juste son Excellence. Elle lui sourit, ses yeux brillants par la chaleur ambiante, elle avait bien fait de revêtir son chapeau. D'un signe de main, elle lui signifia qu'il pouvait prendre place à ses côtés, elle savait qu'elle était invisible mais elle gardait sa légendaire politesse.

-Oui je le suis, pensive, et assomé par cette chaleur. Disons que le surmenage m'épie avec intensité, et qu'il aura bientôt ma peau.

Il était peut être temps de prendre congé définitivement, il y avait des papiers à faire au Mont, des rires d'enfant à contempler. Spontanément, elle lui demanda:

-Suis-je invisible Camisard?

C'était une réelle question, et cela la turlupinait de plus en plus.

Rohhh, il avait horreur de faire sursauter les dames. Pourtant cela lui arrivait souvent ! Il ne savait pas si cela venait de sa grosse voix grave; ou bien si cela venait de sa façon furtive de se déplacer. Quoi qu'il en soit cela lui donnait l'impression d'être un spectre effrayant et il détestait cela.

Il s'assit à coté de la Chambellan qui lui confiait son désarroi, son sentiment de surmenage. Les charges multiples et bien souvent ingrates étaient un fardeau lourd a porter. Ce qui étaient le plus frustrant c'est quand certains œuvraient patiemment et sérieusement sans faire de vague, là où d'autres, plus arrivistes voulaient tout et tout de suite sans faire une once de preuves.

D'ailleurs la question ne se fit pas attendre et bien qu'elle aurait pu en étonner plus d'un, il l'a comprenait.

Nennya Blackney a écrit:: -Suis-je invisible Camisard ?

Nennya l'invisibilité irait contre toutes les lois de la nature, cela me semble impossible. Plus sérieusement je crois comprendre.

Vous savez je crois que cela ne viens pas spécialement de vous mais de la façon dont ce monde fonctionne. Nous sommes tous préoccupés et du coup nous ne prennons pas assez le temps de considérer autrui. Parfois nous n'osons simplement pas, par peur de déranger, d'être intrusif. Au final seuls ceux qui font le plus de tapage autour de leur petite personne, sont remarqués. Pourtant ce sont rarement les personnes les plus dignes d'intérêt.

Je crois qu'il faut donc suivre sa route sans se soucier d'être vu ou pas. Faire les choses par plaisir ou amour et laisser le reste.
Et puis il peut nous arriver à nous aussi de décevoir ou de passer à coté d'autrui.

La Chambellan écouta attentivement Camisard, voilà de sages paroles, et il semblait bien plus censé qu'elle. Nennya regrettait de ne pas avoir autant de courage, elle avait bien du mal à palier ce défaut. Tapant sur la cuisse de son ami, en tout bien tout honneur hein, elle dit:

-Camisard, c'est ce qu'il me fallait, vous savez me remonter le moral à bloc, il est vrai que je ne dois pas me soucier des opinions parfois exagérées sur moi, j'ai toujours été franche, et il est temps que tout le monde sache qui je suis.

Heureuse de cette discussion, il avait su faire un délic en Nennya.

-Et vous, t'arrives tu de douter autant?

Ou c'était juste un trait de la Blackney?

La Mont Saint Michel parraissait satisfaite de la réponse. Ses dires semblaient empreints de détermination.
Puis elle ajouta ausitôt.

Nennya Blackney a écrit:: -Et vous, t'arrives tu de douter autant?

La tournure originale de la phrase le fit sourire. Ce mélange de vouvoiement et tutoiement avait un certain charme (en tout bien tout honneur aussi ^^).

Oui tout le temps, en fait ... Vous savez un grand homme que vous avez bien connu a dit ceci :

Citation :: L’homme ne peut se définir par lui-même : il est ce que l’affect extérieur fait de lui. L’homme libre choisit les affects auxquels il se livre pour améliorer son conatus, sa puissance de vie.

En fait vous vous sentez invisible car vous vous concentrez sur les personnes qui vous renvoient cela. Le seul moyen de se libérer est de se focaliser sur les retours positifs que nous offre la vie. Une parole agréable, un compliment d'un proche ou à la limite se féliciter soi même, quand on est content du travail accomplit. Et pour le reste, on essaie de l'oublier...

Au fait ce grand homme s'appelait Rory ....